Aller au contenu

[Interview] Ylan de Raspide – cofondateur de Studio Jiminy

Il y a quelques semaines, je vous ai présenté la maison d’édition multimédia Studio Jiminy: c’était à l’occasion de la sortie de leur épisode sur la photo de rue avec Bernard Jolivalt. Je continue à suivre de près ce projet et j’ai été enthousiasmé par l’épisode sur la photo de nuit avec Richard Vantielcke et celui sur le portrait avec Jean Turco. Studio Jiminy est sur de bons rails et le contenu reste de qualité. La ligne éditoriale me semble toujours pertinente même si la concurrence de certaines chaines Youtube, gratuites, est forte. La force de Studio Jiminy reste une approche globale (prise de vue, retouche, podcasts…) avec un esprit « masterclass » très riche. On peut s’inspirer de la pratique de chaque photographe invité plutôt que de suivre une sorte de mode d’emploi. J’ai beaucoup appris avec les vidéos de Mark Wallace ou Joël Grimes, mais c’est en anglais et il faut regarder nombre de vidéos pour avoir une vue d’ensemble de leur approche.

Bref, Studio Jiminy est un beau projet et j’avais envie de vous présenter l’un de ses fondateurs, Ylan de Raspide. Je lui laisse donc la parole, il vous parlera mieux de Studio Jiminy que moi!

couverture

Bonjour Ylan, peux-tu nous présenter en quelques mots les fondateurs de Studio Jiminy?

Je suis à l’origine un professionnel du livre : j’ai été éditeur une douzaine d’années aux Éditions Pearson où j’ai développé un secteur pratique consacré à la photographie. J’ai alors travaillé avec des photographes passionnants qui continuent aujourd’hui de me faire confiance.
C’est durant cette période que j’ai rencontré Sylvain Ceccaldi, un webdesigner de grand talent. Nous avons beaucoup échangé sur nos visions de l’apprentissage, de l’édition, du multimédia. Petit à petit nous avons dessiné les contours de Studio Jiminy et nous nous sommes lancés à plein temps dans l’aventure.

ylan_et_sylvain

Deux heures du matin, drôle d’endroit pour un tournage…. L’équipe au complet, à la prise de son et la prise de vues, et Richard Vantielcke qui pose pour l’une de ses compositions.

Pratiques-tu la photographie?

J’ai un Minolta SRT 101 avec un 50 mm qui ouvre à 1,2.
Mais ma véritable passion, c’est l’édition, le travail sur le contenu : montrer comment les photographes pensent et construisent leurs photos, les suivre sur des journées de prise de vue, assister à la revue des images à leurs côtés, poursuivre les discussions au travers de podcasts. C’est un immense plaisir et c’est extraordinairement enrichissant. C’est cette approche que nous voulons partager avec les amateurs.

podcast-dyptique

Enregistrement d’un podcast avec Jean Turco. Il était question de la gestion du modèle et du choix de la pose.

Comment est né ce projet?

D’une frustration peut-être. Les livres que je publiais ne répondaient pas à toutes les questions que je me posais.
● Comment Bernard parvient-il à saisir “ces petits dérapages du quotidien” qui font le sel de la photo de rue ?
Nous pouvons le montrer au travers de nos reportages vidéo.
● Comment Jean Turco modèle-t-il sa lumière en studio… ?
C’est un processus très minutieux, avec beaucoup d’expérimentations, difficile à montrer dans un livre. La vidéo convient mieux.
● Photographier la nuit, c’est une atmosphère aussi. On s’en rend bien compte en suivant Richard.

barbe-dyptique

Bernard Jolivalt en pleine action.

Il est difficile de d’illustrer ces questions pourtant essentielles dans un livre. Avec Studio Jiminy, nous montrons comment les photographes construisent leurs images “en temps réel”. Les podcasts servent ensuite à approfondir et synthétiser leur démarche ou des aspects techniques liés à leur pratique.
En mêlant la vidéo, l’audio et l’écrit, nous créons un objet éditorial mieux à même de répondre aux attentes de l’amateur.

Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées pour lancer Studio Jiminy?

Elles sont nombreuses, il faut une sacré dose de conviction pour se lancer dans un pareil projet.
Notre principale challenge est celui de la visibilité. À quoi bon disposer d’un contenu de qualité, qui répond à une attente, si nous ne parvenons pas à en informer l’amateur ?
Pour cela, nous ne disposons pas d’un service spécialisé ni même d’une personne dédiée. Nous sommes une toute petite structure (deux associés et une personne pour les vidéos) et nous devons produire un contenu d’une grande richesse tout en assurant la communication. Nos journée sont longues !
C’est pourquoi les relais dans la presse, sur les blogs comme le tien, et même le bouche à oreille sont pour nous si importants.

Studio Jiminy est une « maison d’édition multimédia”. Toi qui vient de l’édition papier, en quoi ton expérience a été déterminante dans la réussite de ce projet?

Auprès des photographes et des relais d’opinion, cette expérience m’a apporté une certaine crédibilité et une vraie légitimité. Même si Internet pose des défis différents de l’édition papier, il faut être capable de construire une ligne éditoriale forte et de qualité. Ce n’est qu’ainsi que nous parviendrons à nous faire un nom.
Un éditeur est avant tout une personne qui travaille le contenu et l’édition papier a été pour moi extrêmement formatrice, notamment en termes d’exigence. Nous nous retrouvons totalement sur ce point avec Sylvain : notre volonté est de proposer un contenu à haute valeur ajoutée éditoriale.

Comment réagissent les photographes à qui vous demandez d’intervenir dans vos épisodes? Notamment quand il s’agit d’être filmé!

Nous montrons les coulisses de création de l’artiste au travers de reportages vidéo. Il faut donc que nous soyons totalement acceptés, que le photographe nous accueille dans l’intimité de son processus créatif, qu’il existe une vraie confiance ; c’est pourquoi nous passons beaucoup de temps à discuter avant les journées de prise de vues.
Ensuite, il est vrai qu’être filmé peut impressionner un photographe plus habitué à se trouver de l’autre côté de l’objectif. Mais nous ne souhaitons pas le montrer de face, plein cadre, comme s’il donnait un cours. Nous le filmons dans sa pratique, nous voulons surtout montrer ce qu’il voit, et comment il le voit

situation-portrait

Notre but est de voir le photographe, mais surtout de se mettre en situation pour montrer ce qui l’intéresse.

Un bon photographe n’est pas forcément un bon pédagogue. Avez-vous parfois eu besoin de « coacher » vos intervenants pour que leurs propos soient le plus clairs possible?

Non, car nous ne voulons pas montrer un professeur de photographie, mais un artiste au travers de sa pratique. Nous ne lui demandons pas de jouer un rôle, mais d’être naturel, et de dire simplement ce qu’il fait. C’est la singularité de son regard qui nous intéresse et qui, nous nous en rendons compte, intéresse l’amateur. Cela ne signifie pas que nos vidéos ne soient pas très construites : dans chacune on y raconte l’histoire d’une image, d’une prise de vue et je trouve cela passionnant.
Ce n’est qu’ensuite que nous construisons, à partir des vidéos et des podcasts, des fiches pratiques qui présentent, avec un grand souci de pédagogie, des synthèses techniques ou artistiques liées à la pratique du photographe. Là mon expérience d’éditeur papier joue à plein.

Après 3 éditions, quel bilan faites-vous de l’aventure « Studio Jiminy »?

Les trois premiers épisodes que nous avons mis en ligne proposent trois regards extraordinairement différents, trois approches de la photographie qui se répondent ou se confrontent. C’est de la multitude de ces regards que vient je pense notre force et notre originalité.
Quelle différence entre Jean Turco qui modèle minutieusement ses images en studio et Bernard Jolivalt qui photographie sur le vif, sans parfois s’arrêter de marcher !
Et les errances de ce dernier font parfois penser à celles, nocturnes et plus inquiétantes, de Richard Vantieclke, qui lui se met en scène devant l’objectif (ce qui, en photo de rue n’est évidemment pas envisageable 😉
Nous souhaitons aider l’amateur à développer son regard. Cette approche est comprise par nos abonnés et c’est une vraie satisfaction.

situation-tryptique

Trois photographes, trois univers et trois regards.

Dans mon premier article sur Studio Jiminy, j’avais émis des réserves sur le modèle économique choisi: un abonnement limité dans le temps qui, selon moi, incite les clients à patienter avant de s’abonner pour bénéficier de plus de contenu. Me suis-je trompé?

Non tu ne t’es pas trompé. Nous apprenons et nous avons modifié notre offre très récemment avec l’arrivée du Pass mensuel.
Déjà il faut souligner la très grande richesse d’un épisode (entre 5 et 7 heures de contenus multimédia et une dizaine de fiches pratiques). Il faut du temps pour explorer vraiment un épisode.

Nous proposons aujourd’hui deux offres :

Le Pass 1 mois à 30 euros vise à satisfaire ceux qui ont une demande “à la carte”, qui s’intéressent à une thématique ou un photographe en particulier. Ces amateurs peuvent évidemment accéder à leur épisode, mais aussi à tous les autres, car nous avons choisi d’ouvrir l’ensemble de notre catalogue. En 1 mois il est possible d’explorer un épisode, probablement 2, peut-être 3, mais sauf à risquer l’indigestion, il ne guère possible d’en creuser plus. Ou alors en restant à la surface, ce qui serait dommage.

Ceux qui souhaitent se former avec nous sur la durée, en suivant des photographes qui correspondent ou non à leurs affinités mais qui tous pourront nourrir leur regard bénéficieront toujours du Pass 12 mois à 150 euros (soit l’équivalent de 12,50 par mois). Et nous leur offrons en plus la possibilité exclusive de poser des questions au photographe.

Un projet qui n’évolue pas finit toujours par s’essouffler. Peux-tu nous dire ce que Studio Jiminy à dans ses cartons pour 2016?

Beaucoup d’idées, ensuite il faut sélectionner celles qui sont les plus importantes et nous concentrer dessus.

J’aimerais par exemple poursuivre l’aventure en proposant des tirages d’art. Vous voyez un photographe réaliser une photo dans un épisode, vous avez tout l’historique de l’image, vous savez comment elle a été pensée, comment elle s’est construite… Il pourrait être intéressant d’assister aux discussions entre le photographe et un tireur quant à au choix du papier par exemple. Et d’avoir ensuite la photographie, signée et numérotée. Cela apporte du sens je trouve. Je serais curieux de savoir ce qu’en pensent tes lecteurs !

Dans un futur plus proche, une nouvelle version du site est en préparation, afin que la richesse de notre contenu soit plus apparente. Et nous continuons évidemment le tournage des épisodes avec de nouveaux photographes dont les regards et les approches nous interpellent.
Enfin, toujours pour contribuer à développer le regard, nous allons lancer une chaîne de podcast où nous amènerons à rencontrer d’autres photographes, ayant des démarches propres, que nous suivrons à termes ou non.

Affaire à suivre donc sur studio-jiminy.fr

Et pour vous donner envie, voici les « bandes annonces » des trois premiers épisodes!

TEASER PORTRAIT

TEASER RUE

TEASER NUIT

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *